Quelles sont les alternatives aux Ehpad ?

Publié le

Peggy Cardin-Changizi

Temps de lecture estimé 8 minute(s)

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Face à l’augmentation du nombre de personnes âgées dépendantes, la question de leur prise en charge se pose de manière de plus en plus aiguë. Si leur souhait est de rester majoritairement à leur domicile, de nouvelles solutions axées sur le partage, la convivialité et la sécurité existent.

Le vieillissement de la population est un véritable enjeu de société. Surtout lorsqu’il s’agit des personnes âgées en perte d’autonomie. L’Insee estime que les seniors en perte d’autonomie seront près de 3 millions en 2027 et 4 millions en 2050 (soit 16,4 % des personnes âgées de 60 ans ou plus).

« Aujourd’hui, quand on interroge ces seniors, une grande majorité d’entre eux (plus de 80 %) souhaitent vieillir à domicile car ils sont attachés à leur environnement, leurs souvenirs et leur communauté locale », constate Hervé Sauzay, président fondateur de l'Institut Français des Seniors, cabinet de conseil et d’études spécialisé sur les 50 ans et plus. Mais ce souhait doit s’accompagner d’une planification appropriée. « Le maintien à domicile sous-entend des aménagements du logement pour le rendre plus accessible et sécuritaire, et ainsi minimiser les risques de chute, qui constituent souvent le motif d’urgence pour une entrée en Ehpad ».

Aménager le domicile du senior

« La majorité des aménagements permettent de retarder la dépendance », précise le Dr Stéphan Meyer, vice-président de l'Association nationale des médecins coordonnateurs et du secteur médico-social (MCOOR). Pour que la personne âgée puisse rester chez elle, il faut mesurer la perte d’autonomie.

« Pour cela, on peut faire appel à un ergothérapeute qui va dresser un état des lieux de l’environnement du patient, en prenant en compte ses habitudes de vie, ses capacités et ses éventuelles difficultés. Il proposera ensuite des solutions pour améliorer le confort, la sécurité et l'ergonomie du logement, comme remplacer une baignoire par une douche, installer une main courante ou fixer les tapis au sol… ». Bien que prescrite par le médecin généraliste ou un spécialiste, l’ergothérapie n’est pas prise en charge par la Sécurité sociale.

Pour maintenir la personne âgée à son domicile, plusieurs projets de Centres de Ressources Territoriaux (CRT) ont récemment vu le jour. Le CRT s’inscrit dans la continuité d’un programme baptisé Ehpad « hors-les-murs », qui permet aux personnes âgées dépendantes de bénéficier des offres disponibles en Ehpad (portage de repas, aides ménagères, soins infirmiers, téléassistance…) mais à domicile.

« Dans le cadre d’appels à projet lancés par les Agences régionales de santé (ARS) et les conseils départementaux, un Ehpad peut candidater pour devenir un CRT et ainsi disposer d’une trentaine de places supplémentaires en dehors de ses murs, détaille Valérie Levacher, directrice du Pôle Accompagnement chez VYV3 (établissements de soins et d’accompagnement du Groupe VYV). Pour disposer de ce service, la personne âgée devra elle aussi candidater par l’intermédiaire de son médecin traitant, son infirmier ou son ergothérapeute ». A l’heure actuelle, un seul Ehpad est autorisé à devenir CRT par département. Ce chiffre devrait monter à 5 par département d’ici à 2025.

« Grace à ce dispositif, la personne âgée pourra ainsi bénéficier d’une expertise gériatrique, cognitive, mais aussi sociale qui permettra de dépister le risque de rupture de la perte d’autonomie », précise le Dr Meyer. Pas de surcout pour le bénéficiaire à domicile puisque le CRT reçoit une dotation annuelle pour assurer ces nouvelles missions.

Les résidences autonomie : des loyers modérés.

Anciennement appelées foyer-logement, les résidences autonomie (environ 2300 établissements qui offrent 120 000 places d’hébergement) constituent des ensembles de logements individuels et privatifs pour les personnes âgées, associés à des services collectifs. Souvent construites au cœur des villes à proximité des commerces, des transports et des services, elles sont majoritairement gérées par des structures publiques, notamment les CCAS (centres communaux d’action sociale) ou des organismes à but non lucratif.

« Ces structures, non médicalisées, offrent aux seniors la possibilité de vivre dans un cadre sécurisé et adapté, explique Valérie Levacher (VYV3). Ils peuvent ainsi bénéficier d’un appartement privatif, des espaces communs ainsi que des services tels que la restauration, le ménage, la blanchisserie, la téléassistance, Internet… ».

Dans certaines résidences, des aides-soignants sont présents sur place. En complément, des animations et des activités, parfois facturées en plus de la redevance de base, sont proposées au sein de la résidence autonomie ou à l’extérieur. Pour vivre dans une résidence autonomie, il faut être âgé de 60 ans ou plus et être autonome (GIR 5 ou 6)*. « Les logements sont proposés en location et leurs loyers restent relativement abordables puisqu’il s’agit d’habitations à vocation sociale ». Il s’élève entre 600 et 900 euros pour des appartements allant du studio au F2.

Habitat inclusif : un chez-soi et une vie sociale partagés

L’habitat inclusif est une solution de logement pour les personnes âgées comme pour les personnes handicapées. Les habitants y vivent dans des logements privatifs situés dans un habitat social collectif (entre 30 et 50 appartements par résidence). Ils partagent ainsi des espaces communs et un projet de vie sociale afin de favoriser la convivialité, la solidarité...

Valérie Levacher cite l’exemple de la résidence Ekip’Âge Le Pré du bois à Baden (Morbihan). Elle est développée avec le groupe Arcade, spécialiste de l’habitat et du logement social. « Le projet vise à assurer un vieillissement en meilleure santé à travers des logements indépendants, sécurisés et ergonomiques ; mais aussi avec la présence d’un animateur salarié, qui a pour mission de favoriser le lien social », précise-t-elle.
Les résidents ont le choix de faire appel à tous les services qui leur sont nécessaires, comme dans un logement classique : services d’aide et d’accompagnement à domicile, services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), services polyvalents d’aide et de soins à domicile (SPASAD)... Des demandes d’aide personnalisée au logement (APL), d’allocation personnalisée d’autonomie (APA) ou d’allocation de logement social (ALS) sont autorisées. « Les demandes d’habitat inclusif peuvent être soutenues par les conseils départementaux qui, sur appel à projet, financent ce que l’on appelle l’aide à la vie partagée (AVP). Cela permet de financer une partie de l’animateur présent dans ces collectifs ».

Des habitats partagés pour favoriser les échanges

Depuis la canicule meurtrière de 2003, la colocation intergénérationnelle se développe en France, particulièrement entre étudiants et personnes âgées. « Dans ce modèle de vie, des personnes âgées partagent leur domicile (le plus souvent une chambre supplémentaire) avec des personnes plus jeunes, généralement des étudiants ou des jeunes actifs de moins de 30 ans, qui leur apportent compagnie et menus services », précise Hervé Sauzay, citant les 3 principaux acteurs du marché (le pari solidaire (groupe SOS), ensemble2générations et Colette).

Le loyer que le jeune devra payer et les services demandés par le senior sont fixés par la loi (selon la loi Elan sur le logement du 23 novembre 2018 et un arrêté du 13 janvier 2020). On peut bénéficier des aides personnalisées au logement (APL).

Autre formule d’habitat partagé : l’accueil familial senior. « Ce dispositif permet à des personnes âgées qui ne peuvent ou ne veulent plus vivre chez elles de vivre au domicile d'une famille d'accueil », poursuit Hervé Sauzay.

La famille d'accueil est agréée après avoir suivi une formation et une initiation aux gestes de secourisme organisées par le conseil départemental. Elle fournit à la personne âgée l'hébergement, les repas, les soins quotidiens, l'aide à la toilette, la gestion des médicaments ainsi que la compagnie et le soutien affectif. L'accueil familial senior est rémunéré avec un salaire net (sur une base de 28,80 euros brut par jour) auquel s’ajoutent des indemnités liées aux conditions d’accueil.

Enfin, les maisons partagées entre seniors sont en plein essor. Ce dispositif de « colocation pour seniors » comprend une chambre individuelle, avec sanitaire indépendant, pour chaque résident et un espace commun équipé pour les repas et les animations. Le tout encadré par un service de gestion et d’aides à domicile.

Demander des aides

Pour faciliter le vieillissement à domicile des seniors de plus de 60 ans en perte d’autonomie, une demande d’allocation personnalisée d’autonomie (APA) peut être déposée auprès des conseils départementaux. L’APA permet de financer les aides à domicile (aides ménagères, auxiliaires de vie…) et les équipements nécessaires pour rester à la maison. Pour bénéficier de l’APA, il faut être âgé de 60 ans ou plus,
résider en France de façon stable et régulière et être en perte d’autonomie (GIR 1, 2, 3 ou 4).
L’APA n’est pas soumise à condition de ressources. Mais son montant est calculé en fonction des revenus, du coût des aides prévues dans le plan d’aide et du GIR* (niveau de perte d’autonomie).

D’autres aides peuvent être demandées comme le service d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) pour le portage des repas ou encore le service de soins infirmiers à domicile (SSIAD) pour faire la toilette.

En complément, pour effectuer des travaux d'adaptation du logement, il est possible de déposer des demandes de financements auprès de Soliha (mouvement solidaire pour l’habitat) ou de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH).

* Le GIR correspond au niveau de perte d’autonomie d’une personne âgée. Il est calculé à partir de l’évaluation effectuée à l’aide de la grille AGGIR. Il existe six GIR : le GIR 1 est le niveau de perte d’autonomie le plus fort et le GIR 6 le plus faible.

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